2014 : bilan mitigé pour les transports, entre crise, inquiétudes et gaspillage d’argent

5 janvier 2015 Transport 1 Comment Marie MEHAULT
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ecotaxeDernier jour de l’année 2014… en ce 31 décembre, il est temps de dresser le bilan d’une année… compliquée, à tout le moins, dans le secteur des transports en France. 2014, aura été marquée par l’immense gaspillage d’argent, de temps et d’énergies humaines que représente le fiasco de l’écotaxe. Une année sombre aussi pour les transporteurs, frappés de plein fouet par la crise, avec un fort sentiment d’abandon des pouvoirs publics, voire d’un « matraquage en règle » d’une économie déjà fragile. Une année, également, marquée par les grèves à répétition dans tous les secteurs, que ce soit les transports publics dans les villes, la SNCF, ou dans l’aérien. Et puis, enfin, une année qui se caractérise par rapport aux précédentes, par une augmentation très nette du sentiment d’insécurité dans les transports, tous secteurs confondus, sur la route, dans les airs, sur mer ou sur rails.

 

colereBien sûr, ce qui restera dans les annales, c’est l’incroyable échec de l’écotaxe : le gouvernement se débat avec ce projet depuis des mois et des mois, plus d’un an même, bientôt deux ! Et il n’en a toujours pas fini avec ce dossier qui lui a déjà coûté plusieurs millions d’euros, puisqu’aujourd’hui les sociétés de télépéage réclament leur part d’indemnisations : 2 millions d’euros pour compenser le manque à gagner de l’écotaxe, car ces entreprises étaient un maillon important de la mise en œuvre concrète de ce nouvel impôt écologique. Elles ont investi, pour renforcer leurs effectifs commerciaux et engager des frais marketing supplémentaires, ou encore pour faire fabriquer les 600 000 badges qui devaient permettre de géolocaliser les poids lourds. Mais avec l’abandon de l’écotaxe, tout cela n’a servi à rien. Et les dépenses ont été réalisées à fonds perdus. S’estimant lésées, les sociétés de télépéage menacent le gouvernement de porter l’affaire en justice. Philippe Dutoit, directeur général d’Eurotoll, l’une de ces sociétés, prévient : « Si nous ne trouvons pas d’accord avec l’Etat, dans la deuxième quinzaine de janvier nous envisagerons de déposer un recours. Nous avons commencé ce travail, qui est un peu fastidieux, pour démontrer le lien entre toutes ces factures payées pour rien, et la taxe poids lourd. »

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portailsEt de l’argent jeté par les fenêtres, il n’y a pas que celui là : 850 millions d’euros versés à Ecomouv’, la société chargée de mettre en place toute l’organisation de l’écotaxe, pour résiliation de son contrat ;  7 à 13 millions d’euros pour démonter les portiques déjà installés sur les routes qui devaient être soumises à l’impôt… L’abandon de l’écotaxe par le gouvernement, et notamment les épisodes de fronde des routiers et des bonnets rouges, a tellement marqué les Français que 45% d’entre eux ont répondu que « c’était l’événement le plus marquant de l’année 2014 », selon le dernier baromètre Tilder-LCI-Opinionway, qui fait le point sur l’année qui se termine. « Avec l’écotaxe en première position, c’est le recul du gouvernement qui est souligné, recul dont il faut se souvenir qu’il est intervenu après la fronde des bonnets rouges, illustration d’un climat social dégradé », écrivent ainsi les auteurs de cette étude.

 

bonnets_rougeL’écotaxe, une illustration parmi d’autres de la colère des routiers, une colère essentiellement alimentée par la crainte de l’avenir, des trésoreries de plus en plus déficitaires face à cette crise économique qui n’en finit pas, et un sentiment d’être « les pigeons de l’Etat ». Un sentiment, non seulement d’abandon, mais aussi de persécution, « comme si nous étions les seuls Français à devoir payer le déficit du pays en étant de plus en plus raquettés et ponctionnés, alors qu’on n’a plus d’argent et qu’on se pose chaque mois la question de savoir comment on va payer nos salariés », témoigne ce patron d’une petite société de transport, dans l’Oise, au bord du dépôt de bilan. Taxes, concurrence des pays de l’Est, fermetures d’entreprises et plans sociaux à la pelle, dont les Mory Ducros resteront le symbole, pour 2014… les professionnels du transport ont l’impression amère que cette année écoulée n’aura été qu’une accumulation de mauvaise nouvelles, à part peut-être, ces derniers mois, la baisse spectaculaire des prix du carburant, qui a permis à certains de relever un peu la tête.

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accidentMais de manière générale, 2014 a été une année noire pour tous les métiers du transport. Aucun secteur n’a été épargné : d’ailleurs, toujours selon le baromètre Tilder-LCI-Opinionway, les conflits sociaux, en particulier à la SNCF et à Air France, arrivent en deuxième position des événements les plus marquants de l’année, cités par 26% des sondés. « Le désordre social laisse donc une forte trace, ce qui fragilise la posture du gouvernement dont l’une des actions retenues est la cure d’austérité à 50 milliards d’euros : pas de quoi redorer son image », note ainsi Tilder. Grève EasyJet ces 31 décembre 2014 et 1er janvier 2015, grève des cheminots début novembre 2014, grève des pilotes Air France en septembre : des conflits, qui battent régulièrement des records historiques d’intensité et de durée, et qui sont très majoritairement suivis. Pour l’aviation, 2014 a carrément été une année cauchemardesque, avec des catastrophes qui ont marqué l’opinion et ont fait spectaculairement chuter sa côte de confiance dans le transport aérien. Les drames qui ont frappé les compagnies malaisiennes AirAsia et Malaysia Airlines, notamment, ont frappé les esprits, et leur souvenir a encore resurgi ces derniers jours avec la disparition entre l’Indonésie et Singapour du vol QZ8501 d’AirAsia, ce dimanche 28 décembre 2014… 162 personnes étaient à bord.

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De manière générale, le sentiment d’insécurité dans les transports a grandi, dans l’opinion publique… et dans les faits. De sources policières, les agressions dans les transports urbains comme les bus, le tramway ou le métro, ont été plus nombreuses cette année que les précédentes ; en mer, l’incendie qui vient de faire 13 morts sur le Ferry Norman Atlantic a remis en lumière les problèmes de sécurité à bord, de formation des équipages à secourir les passagers, et des failles dans le contrôle de ceux qui montent à bord. Sur les routes enfin, alors qu’elle avait baissé de plus de 10% en 2013, la mortalité routière est repartie à la hausse : +5% en 2014… et les chauffeurs poids lourd en sont aussi victimes.

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Dans ce contexte, il n’est pas difficile pour toute l’équipe de Jobtransport de vous souhaiter une bien meilleure année 2015… tous nos vœux de bonheur et de réussite, dans tout ce que vous entreprendrez !

 

Marie MEHAULT