Transports professionnels : à quand la révolution électrique ?

4 septembre 2014 Transport 2 Comments Marie MEHAULT
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Photo : Siemens

Aux Etats-Unis, c’est déjà prévu : une autoroute électrique destinée aux poids-lourds, expérimentée sous le soleil de Californie. C’est Siemens qui va tester ce dispositif révolutionnaire, appelé « eHighway » par les initiés. Le principe : le même que celui des trolleybus, c’est-à-dire un système de pantographes connectés à des câbles aériens, et permettant aux camions (hybrides) de se relier au réseau électrique. L’autoroute elle-même sera hybride, avec une voie dédiée à ces véhicules particuliers, et les autres voies pour les véhicules conventionnels.

 

renaultFaut-il voir dans cette initiative le signe que la révolution électrique est – enfin – en marche, y compris pour le transport professionnel ? En fait, cela fait un moment déjà que l’expérimentation progresse, à petits pas certes. Mais progressivement, semble se dessiner un nouveau schéma pour les convoyages de demain, soumis à des contraintes de préservation de l’environnement désormais inéluctables…Bien sûr, il faudra encore beaucoup de temps avant de voir sur nos routes et nos autoroutes autant de véhicules utilitaires et de poids-lourds électriques que de camions diesel aujourd’hui. N’empêche : il flotte un petit quelque chose dans l’air qui laisse à penser que ça y est, les industriels et les pouvoirs publics ont clairement décidé de faire de l’électricité la solution de demain, pour tous les modes de transport.

 

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Photo : Siemens

Si ce test californien est probant, l’objectif américain serait ainsi de relier les ports de Los Angeles et de Long Beach sur une trentaine de kilomètres extrêmement empruntés par les poids-lourds. Ailleurs, en Allemagne par exemple, ce sont les bus électriques qui sont de plus en plus plébiscités par les pouvoirs publics. Ainsi, la ville de Cologne vient d’annoncer, à la mi-août, la mise en place d’une nouvelle flotte de bus électriques à recharge rapide automatisée pour desservir la ville. Dotés d’un système de recharge rapide et automatisée, ils seront en phase de test cet automne.

 

busIdem à Londres, où – signe définitif que les temps changent ! – les indétrônables bus rouges à deux étages se voient désormais concurrencés par une flotte de bus électriques expérimentaux, qui viennent d’être livrés à la ville par le constructeur britannique Optare, dans le cadre d’un projet là aussi expérimental. Disposant de 160 kilomètres d’autonomie, ces véhicules de transport collectif se rechargent complètement en deux heures grâce à des infrastructures dédiées : « La mise en place de ces nouveaux bus électriques fait partie de notre évaluation continue des nouvelles technologies », explique Mike Weston, Directeur de « Transport for London ». « Nous surveillons de près les résultats de ces essais qui pourront nous aider à adopter plus largement cette technologie à Londres ». En parallèle, dans la capitale britannique, ce que l’on appelle des ULEV (Ultra Low Emissions Zones) vont être mises en œuvre d’ici 2020, des zones où, comme leur nom l’indique, la pollution par émission de particules fines devra être la plus infime possible.

 

fabricationAu niveaux des véhicules utilitaires, pour le transport express de petites marchandises, là encore les professionnels se voient désormais proposer de plus en plus de nouveautés : ainsi, par exemple, un célèbre constructeur japonais qui a présenté début août 2014 un nouvel utilitaire 100% électrique. Avec un moteur électrique de 109 chevaux et une autonomie annoncée de 170 kilomètres, ce véhicule peut embarquer jusqu’à 4.2 mètres cubes ou 2 euro-palettes, avec une charge utile maximale de 770 kilos, soit 120 kilos de plus qu’un utilitaire classique du marché ! Avec une possibilité de charge rapide à 80% en 30 minutes, ce type de camionnette devient à peu près rentable pour la profession, dont le budget carburant est par ailleurs de plus en plus lourd… Le prix à l’achat est également inférieur à la version classique, et qui sait, en cas de nouvelles taxes à la pollution, ce type d’investissement peut devenir carrément avantageux !

 

recharge« Lorsqu’on parle de pollution automobile, beaucoup pensent à la voiture individuelle, mais ce sont en réalité les camionnettes et les poids lourds qui ont le plus de responsabilité », explique-t-on chez le constructeur en question. « Partout, le transport  de fret devrait doubler d’ici 2050 tandis que les ressources pétrolières vont continuer à diminuer. D’ici 2030, les émissions de CO2 dues au transport de marchandises devraient augmenter de 30%… Alors c’est à nous de devancer les exigences des pouvoirs publics, qui vont devenir de plus en plus drastiques, pour que notre clientèle puisse trouver chez nous des moyens de contourner la difficulté sans contourner la loi, et en faisant de réelles économies d’échelles sur le moyen et le long terme, à la fois sur le carburant et sur les impôts qui taxent de plus en plus impitoyablement les transporteurs pollueurs. »

 

constructeurA Paris et en Ile-de-France, certaines entreprises proposent déjà des prestations de livraison en B to B de tout type de marchandises (du colis à la palette), avec des poids lourds électriques. Une « livraison éco-urbaine avec un transport de marchandises zéro émission polluante et zéro bruit », explique-t-on ainsi chez Renault Trucks, qui propose ce genre de camion. « Ce type de véhicule conserve toutes ses qualités intrinsèques : mobilité, carrossabilité, capacité de charge…) tout en améliorant fortement ses prestations environnementales. Doté d’une boîte de vitesse robotisée et de batteries lithium ion de dernière génération rechargées en 8 heures pour environ 2 euros par jour, il a une vitesse de pointe de 90 km/h. (…) L’optimisation du moteur électrique, ainsi que la récupération de l’énergie au freinage, permet ainsi une autonomie de près de 100 kilomètres. Bien qu’affiché avec un PTAC de 4.5 tonnes, ce véhicule peut être conduit avec un permis B grâce à une dérogation administrative. »

 

stationL’émancipation des énergies fossiles pour le transport de fret n’est pas encore pour demain, c’est une certitude. Combiner la flexibilité du transport routier et les contraintes du tout électrique n’est pas une mince affaire, quand on connaît le nombre de kilomètres quotidiens parcourus en moyenne par un poids lourd : « Tout cela n’en est qu’à un stade embryonnaire, et généralisé à grande échelle, cela voudrait dire faire des travaux colossaux partout, pour adapter les routes aux contingences du métier et de ce type de transport », analyse Mats Alaküla, expert en véhicules électriques à Lund, en Suède, pays précurseur en la matière. « Il faudra encore patienter très longtemps… ». Mais chaque année, de nouvelles étapes sont franchies vers un transport de marchandises et un transport public durables. Et  l’enjeu est de taille, pour tous.

 
 

Marie MEHAULT